Marché de la réassurance : Les grandes tendances en 2015
Vue de Monaco où se tiennent chaque année les Rendez-Vous de Monte Carlo |
Marché mondial de la réassurance : les tendances à la veille du renouvellement 2015
Les réassureurs se préparent à un renouvellement 2015 très difficile. Le contexte économique les pénalise fortement: afflux de capitaux extérieurs (sidecars, titrisation, obligations catastrophes…), surcapacité, taux d’intérêt bas, recul de la sinistralité, augmentation des rétentions des assureurs, concurrence effrénée. Tous ces facteurs jouent en faveur des assureurs. Ces derniers ne manqueront pas de négocier les taux à la baisse entraînant les réassureurs dans un cycle baissier qui mettra à mal leur rentabilité.
Sur le qui-vive depuis de nombreux mois, les agences de notation ont eu vite fait de diagnostiquer ce retournement du marché. Elles ont été les premières à tirer la sonnette d’alarme, malgré les communiqués rassurants de certains poids lourds de la profession comme Munich Re, Swiss Re et Scor. Dès le début de 2014, Standard & Poor’s a dégradé les perspectives de la réassurance mondiale de stables à négatives. Elle a été suivie en juin par Fitch et Moody’s et en août par A.M. Best.
Un marché de réassurance soft avant le passage en 2015
Depuis deux ans, le marché de la réassurance traverse une période soft. Cette tendance qui a commencé en janvier 2013 s’est poursuivie lors des renouvellements de janvier et de juillet 2014 avec des baisses tarifaires allant jusqu’à 20%. Le recul de la sinistralité enregistrée au premier semestre 2014 (44 milliards USD contre 59 milliards USD un an auparavant) risque d’assouplir encore plus les conditions du marché.
Une nouvelle baisse des prix semble inévitable pour la plupart des programmes, surtout pour ceux qui n’ont pas subi des pertes majeures. Les réassureurs espèrent « sauver les meubles » en lâchant du lest dans certaines branches et en durcissant le ton dans d’autres catégories de risques et régions fortement sinistrées. C’est par le biais de ces renouvellements ciblés qu’ils espèrent contenir la baisse de leur chiffre d’affaires.
Catastrophes naturelles, tendance baissière et nouveaux risques
La majeure partie des programmes catastrophes naturelles se renouvellent au premier janvier. Dès le début de la saison cyclonique en juillet, tous les regards se tournent vers le Golfe du Mexique. C’est la sinistralité enregistrée dans cette région qui détermine en grande partie le prix des couvertures catastrophes naturelles au premier janvier. D’autres régions servent également de baromètre à la fixation de ces taux. Les zones Japon/ Pacifique, Europe du nord et plus récemment la Chine du sud concentrent la plus grande partie des cyclones dévastateurs qui, comme ceux du Golfe du Mexique, pèsent sur les taux.
Vue de la Louisiane après le passage de Katrina |
A fin août 2014, le déclin de l’intensité et du nombre de ces événements pour l’année en cours pèsera sur les tarifs de ce segment, désormais orientés à la baisse. Les coûts économiques et les pertes assurables liés à ces catastrophes ont enregistré pendant le premier semestre 2014 un recul respectif de 30% et de 9,5% par rapport à la même période de 2013.
Si aucun événement majeur ne survient d’ici la fin de l’année 2014, le marché table sur une chute des tarifs 2015 de l’ordre de 15%. Cumulée sur 2013 et 2014, la baisse des taux catastrophes naturelles pourrait atteindre 50%. Selon certains spécialistes, un retournement de situation nécessiterait la survenance d’un événement majeur qui générerait une perte de plus de 100 milliards USD, c’est-à-dire un sinistre d’une ampleur supérieure à Katrina qui a occasionné 85 milliards USD de pertes en 2005.
Evolution des pertes économiques et assurables: 1 er semestre 2013–1 er semestre 2014
Pertes matérielles chiffrées en milliards USD1er semestre 2013 | 1er semestre 2014 | Evolution | Moyenne des 10 dernières années (1er semestre) | |
---|---|---|---|---|
Total des pertes économiques | 56 | 44 | -21% | - |
Total des pertes assurables | 25 | 21 | -16% | 27 |
Pertes économiques liées aux catnat | 59 | 41 | -30% | 94 |
Pertes assurables liées aux catnat | 21 | 19 | -9,5% | 23 |
Nombre de morts | 7 000 | 4 700 | -33% | - |
Crues et inondations © Lamiot, CC BY 3.0 |
A ces sinistres catastrophes naturelles dits d’intensité s’ajoutent depuis quelques années les sinistres de fréquence, comme ceux provoqués par les orages, les chutes de grêle, les crues des grands fleuves.
Additionnées les unes aux autres, ces mini catastrophes naturelles pèsent sur les rétentions des assureurs et sont à l’origine d’une demande supplémentaire de capacité. Sont particulièrement exposés à ce type de risque de fréquence l’Allemagne, la France, la Grande Bretagne et les pays d’Europe Centrale. Selon l’Argus de l’assurance 1 le montant des sinistres grêle et inondation à la charge des assureurs européens s’élève à 7 milliards USD pour le seul été 2013.
1 L’Argus de l’assurance, N°7375, septembre 2014Aviation, nouveau cycle haussier
Après la série noire des catastrophes aériennes survenues depuis le début de l’année 2014, le marché aviation (corps, responsabilité civile et risques de guerre) est fortement orienté à la hausse.
Le marché, qui n’a pas connu un nombre de sinistres aussi élevé depuis le 11 septembre 2001, enregistre cinq événements majeurs pour la seule période allant de mars à juillet 2014.
Les sinistres majeurs aviation durant le 1er semestre 2014
Dommages matériels et R.C. chiffrés en millions USDDate | Vol/avion | Compagnie/lieu | Nombre de morts | Dommages corps | Dommages R.C. | Dommages par sinistre |
---|---|---|---|---|---|---|
24 juillet | AH 5017 | Air Algérie | 118 | 83 | 117 | 200 |
23 juillet | GE 222 | TransAsia Airways, Taïwan | 54 | - | - | 120 |
17 juillet | MH 17 | Malaysian Airlines | 298 | 55 | 545 | 600 |
14 juillet | 11 avions | Aéroport Tripoli, Libye | - | 500 | - | 500 |
8 mars | MH370 | Malaysian Airlines | 239 | 120 | 280 | 400 |
Total | - | - | 709 | 758 1 | 942 1 | 1700 |
La brutale hausse de la sinistralité 2014 marque la fin de la période soft de ce marché qui, malgré un accroissement permanent du nombre d’avions et de passagers transportés, enregistre une baisse régulière de ses encaissements de primes depuis 2003.
Selon certaines estimations, l’augmentation des primes de 2015 se situerait dans une fourchette minimale de 15% à 30% pour les compagnies aériennes d’Asie et d’Europe. Les transporteurs aériens des autres zones subiront également des hausses tarifaires comprises entre 10% et 15%.
Après le crash du vol MH 17 de Malaysian Airlines, abattu par des missiles au-dessus de l’Ukraine et la destruction de 11 avions et des infrastructures de l’aéroport de Tripoli, les taux risques de guerre, vont exploser avec des hausses attendues de l’ordre de 300%.
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